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  • : Le blog de Hubert ORO
  • : Blog consacré essentiellement à mon activité d'urologue, avec toute fois quelques données personnelles (réflexions, pensées), et des anecdotes.
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14 février 2009 6 14 /02 /février /2009 19:07
Je viens de passer 2 journées à écouter un Médecin DIM nous donner les dernières nouvelles de laT2A (Tarification à l'Acte), la fameuse V11. Oh! pardonnez-moi! Il n'est pas certain que vous connaissiez parfaitement tous ces termes. Alors si vous souhaitez approcher quelque peu la complexité du système de santé, je vais essayer de vous la montrer, à travers mon regard. Je peux me tromper bien sûr, et n'hésitez pas à me corriger.

La meilleur façon que j'ai trouvée pour continuer mon propos est de vous mettre dans la situation d'un usager de la santé, c'est à dire un patient, qui consulte un chirurgien dans son cabinet. Le chirurgien fait son travail d'information de diagnostic et de soin. Si le traitement nécessite une intervention chirurgicale, alors là ça se complique. Le patient se rend à la clinique une première fois consulter l'anesthésiste. Il signe le consentement éclairé d'anesthésie. Il revient à la clinique pour l'intervention. Il ramène le consentement éclairé chirurgical, le devis accepté et signé, sa carte sécu, sa carte de mutuelle, ses radios, ses examens ...Le chirurgien amène son aide opératoire (qu'il rémunère lui même). La clinique met à disposition du chirurgien et du patient un bloc opératoire et une infirmière de bloc opératoire diplômée ( IBOD), ainsi que le matériel nécessaire à l'intervention. Cette dernière se déroule et tout ce petit monde se sépare bons amis. Le patient sort de la clinique quelques temps plus tard, passe au service des admissions/sorties, paie le téléphone, la TV, les honoraires complémentaires du chirurgien et de l'anesthésiste (s'il sont conventionnés et secteur 2), la chambre seule (s'il en a demandé une et s'il a été informé du tarif).
Ça, c'est la partie visible de l'iceberg.
Plus opaque, se déroule un autre film avec d'autres acteurs que je vais vous décrire.

La HAS ( Haute autorité de santé) mandate des médecins experts (qui n'ont  souvent d'expert que la prétention), des économistes de la santé, des énarques, des statisticiens pour qu'ils modélisent un système de santé. Ils établissent une classification communes des actes médicaux (CCAM), qui à chaque intervention attribue un somme ( en euro), sensée tenir compte de la complexité du geste opératoire, de sa pénibilité, du caractère urgent etc. Cette somme est versée au chirurgien, via ou non un compte mandataire. Vous remarquerez que le chirurgien perçoit donc pour une intervention donnée une somme d'argent de la part de la CPAM et une autre somme d'argent de la part du patient ou de sa mutuelle ( pour les chirurgiens secteur 2). Le praticien reverse un pourcentage de ses revenus  ( part CPAM) à la clinique pour frais de fonctionnement (de 5 à 10%).

La  HAS demande à la CPAM de rémunérer la clinique. Pour ce faire elle met en place de multiples indices et de multiples critères en fonction desquels la CPAM pourra évaluer et rémunérer l'effort de soin que l'établissement aura déployé pour soigner le malade. Ainsi, le patient est classé en fonction du diagnostic d'entrée ayant motivé l'hospitalisation ( DP) qui se base sur la classification internationale des maladies (CIM 10), en fonction de ses antécédents, de ses comorbidités (CMA), en fonction également des événements survenus au cours de l'hospitalisation et ayant nécessité des soins coûteux (exemple: septicémie, escarre...). Évidemment, l'intervention réalisée au cours du séjour dans l'établissement pèse sur la somme allouée à la clinique pour le séjour en question. A noter que la somme dépend aussi de la durée du séjour. Cependant il existe des bornes basse et haute, ce qui signifie que pour une intervention donnée ( ablation de la vésicule biliaire par exemple) la durée de séjour minimum est de 72 heures et si le patient quitte l'établissement plus tôt  la somme donnée sera minorée. Mais comment savons nous la durée moyenne de séjour pour une intervention donnée? Ces valeurs sont obtenues après observation de groupes homogènes de malades (GHM) et de groupes homogènes de séjour ( GHS). Avant de continuer, une question. Un patient est hospitalisé pour une séjour de 5 jours. Malheureusement, une complication survient et le patient reste finalement 45 jours. Sachant que la borne haute de ce GHS est de 47 jours (c'est à dire qu'à partir du 47ème jour, l'établissement touche un supplément), pensez vous qu'il faille autoriser la sortie au 45 ème jour, ou devrions-nous le garder 2 jours de plus? Eh bien... NON. Car le supplément est infiniment insuffisant pour compenser les dépenses de la clinique pour une journée supplémentaire. Plus vite le patient sortira, moins la clinique perdra d'argent.

A ce stade vous pourriez croire que la clinique est un établissement très lucratif. Pas tant que ça! Car la clinique croule sous les contraintes. Elle est soumise à un un contrôle qualité très sévère (accréditation), portant aussi bien sur la sécurité des patients, sur les protocoles de soins, que sur la tenue des dossiers médicaux, le circuit patient, l'étiquetage des médicaments, la sécurité incendie, la stérilisation des instruments chirurgicaux, le nettoyage des sols...La clinique croule donc sous les dépenses. Dépenses pour mettre aux normes tous les compartiments de la clinique soumis à contrôle de qualité, dépenses pour renouveler le matériel médical, dépenses de maintenance, masse salariale, taxes et autres impôts, pénalités sanctionnant les erreurs de cotation auprès de la CPAM...

Tout ce petit monde est sous l'autorité du directeur de l'agence régionale de la santé (ARS), qui a pouvoir de missionner les établissements publics et privés de sa région, missions selon les besoins de la région en matière de prise en charge sanitaire. L'ARS reçoit des informations sur l'efficience des établissements, taux de mortalité, taux de complications, taux de séjour ambulatoire, accréditation. Avec ces données, elle peut décider de retirer une autorisation d'exercer, une suspension ou des injonctions.

Pour information, le chiffre d'affaire des cliniques a baissé de 6,5% en moyenne nationale depuis 2005. 60% des actes chirurgicaux en France sont réalisés dans le secteur privé. Les hôpitaux licencient, les cliniques recrutent. Des cliniques font faillite. Les hôpitaux en difficulté financière sont sauvés à coup de millions d'euro de subvention. La CPAM est en déficit chronique profond depuis 30 ans. Elle ne peut pas payer grassement tous les acteurs de cette pièce. Pourtant se soigner coûte de plus en plus cher, car les techniques de mise au point des médicaments, des nouvelles imageries, des nouvelles techniques chirurgicales sont coûteuses.

Qu'on se le dise!
Ca va bien, merci. Et vous ?
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commentaires

O
Il n'y a pas plus clair! Et toujours d'actualité bien que le president ait changé 2 fois.<br /> Belle Annee Hubert Oro <br /> Odile, anciennement au Saint Coeur
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T
Bonjour trés bien expliqué, la " GRANDE MUETTE " aussi pourrait en dire des choses ... eux , çà fait des mois et mois qu ils ne sont pas payes... sinon l " OURS DANS LA BERGERIE " il en pense quoi<br /> de tout çà... voilà bonne continuation à vous et votre équipe.
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